jeudi 23 juillet 2009

Le manoir de la Saucerie

Bâti dans une sorte de bout-du-monde marévageux, le manoir de la Saucerie, classé parmi les monuments historiques en 1955, est aussi remarquable par son histoire que par les vestiges qui en demeurent.

Le fief de la Saucerie fut donné, à la fin du XIIe siècle, à Robert, l'un de ses fidèles serviteurs, par la reine Aliénor d'Aquitaine, veuve d'Henri II Plantagenêt, mère de Richard Coeur-de-Lion, roi d'Angleterre, et grand-mère de Louis IX, roi de France (Saint Louis). Ce serviteur était le saucier de la reine, c'est-à-dire l'officier de cuisine chargé de préparer ou de surveiller la salaison, les saumures et les sauces, une mission de confiance à l'époque, il exerçait également la fonction de bailli de Domfront, avec des attributions comptables et fiscales. Le château de Domfront appartenait alors au douaire de la reine d'Angleterre et duchesse de Normandie, la reine y faisait de fréquents séjours.

Après avoir été détenu au XVIe siècle par la famille de Villaine, le fief entra, au XVe siècle, dans la famille Doynel dont un représentant, Madame Elyette Saint Léger (née Doynel de la Saucerie), possède toujours le manoir au début du XXie siècle. On peut signaler qu'à l'occasion de la Révolution, la Saucerie fut vendue comme Bien national mais que la famille Doynel put en récupérer la propriété au cours du XIXe siècle.

Malgré l'extraordinaire conversation de la porte monumentale, le site seigneurial de la Saucerie a été profondément bouleversé au fil des siècles et reste mal connu. Les vestiges actuels sont surprenants mais ne donnent qu'une vision très partielle de l'ensemble fortifié, encore en place au milieu du XIXe siècle.

Bien qu'aujourd'hui tous les bâtiments seigneuriaux soient inclus à l'intérieur d'un même site fossoyé, l'examen des façades de la porte monumentale montre qu'à l'origine, 2 enclos existaient, correspondant à une cour et à une basse-cour.

La porte monumentale constitue à elle seule une unité d'habitation et de défense, un véritable manoir. Sans doute bâtie au XVIe siècle, elle comporte, sur chacune de ses 2 principales façades, une porte charretière et une porte piétonne, équipées chacune, à l'origine, d'un pont-levis. L'habitation se développe sur 4 niveaux et 3 étages, avec un grand nombre de postes de tir intérieurs pour arbalètes ou armes à feu. L'impression qui s'en dégage est une impression de force, avec 4 échaugettes (à l'origine) et un hourois placé en couronnement au sommet des tours et qui rappelle d'anciens hourds de défense. Les couvertures en bardeaux de châtaignier, en forme de carène de navire renversé surmontées d'un élégant clocheton, sont en cours de restauration. Elles confèrent à l'ensemble une personnalité et un pittoresque incontestables.

Un second manoir, aujourd'hui disparu, fut construit au début du XVIIe siècle à l'arrière de cette porte-châtelet. Il était certainement plus confortable. Certaines de ses pierres, sculptées dans le goût de la Renaissance, ont été réemployées dans le bâtiment d'habitation actuel devant lequel fut creusé l'ancien puits à margelle ouvragée.

Il demeure en outre un colombier en colombages, de forme octogonale.

Le manoir de la Guyardière

Le bâtiment principal, d'aspect simple, se compose d'un gros corps de logis rectangulaire à fronton central classique réalisé en 1830, cantonné à l'arrière par 2 pavillons carrés qui ont alors remplacé 2 tours rondes. Il est entièrement entouré de belles douves en eaux et protégé par une tour cylindrique du XVIe siècle dans un angle de sa cour d'honneur. Son avant-cour est introduite par 2 tourelles circulaires, également du XVIe siècle, qui délimitent une porte voûtée en plein cintre surbaissé.

Le blason qui orne cette porte voûtée présente les armes jumelées de 2 familles qui ont successivement possédé ce manoir:

.à gauche, les Cormier, "de gueules au chevron d'or et aux 3 croissants posés 2 en chef, un en pointe",

.à droite, les Le Herissey, "d'argent aux trois hérissons de sable posés 2 et 1".

Une majestueuse allée d'arbres de haute tige, marquée par la tempête de 1999, relie le manoir à la route voisine. Le site de la citadelle et du donjon de Domfront est visible du manoir.

Durant la Seconde Guerre mondiale, les officiers affectés à la Kommandantur de Domfront avaient établi leur résidence à la Guyardière. Lors combats de la Libération, un hôpital de campagne y fut installé pendant quelques mois par les Alliés de la Seconde Guerre mondiale.

De nos jours, une fête horticole annuelle, organisée au manoir le deuxième dimanche d'octobre, connaît un succès croissant auprès du public.

Le manoir a été inscrit en 1992 à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques.


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