samedi 4 avril 2009

Histoire d'Aubusson
De la seigneurie de Gasprée à la baronnie de Flers. Lors de l'apogée de la féodalité, le territoire d'Aubusson faisait partie, au sein du duché de Normandie, de la seigneurie de Gasprée dont le "château", à la limite de Saint-Georges-des-Groseillers et de Flers, se situait en bordure de la Vère et à proximité de son voisin flérien. Le moulin banal de ce fief de Gasprée, où les habitants de la seigneurie étaient tenus de faire moudre leurs grains, était localisé sur le cours du ruisseau d'Aubusson en un lieu qui s'appelle toujours le Moulin d'Aubusson. S'intégrant aux terroirs environnants, Aubusson, avec une église dédiée à Saint-Céneri, oublia donc, à l'époque où le duché de Normandie fut conquis par le roi de France Philippe-Auguste (1204), l'appellation en mesnil pour ne conserver que le nom Aubusson qui avait fixé le premier habitat de la paroisse. Vers 1300, Robert de Fonteines, chevalier et seigneur de Gasprée, fit rédiger un censier recensant les redevances qu'il percevait des tenanciers et paysans de son fief. Ce document permet de connaître les familles qui peuplaient alors la paroisse d'Aubusson(du Coudray, le Corps, Bâtard, Blanchard, Guermont, Sasnes, Maillard, Le Veel.....) et dont certaines, alors que se poursuivaient les défrichements, donnèrent naissance à des hameaux comme ceux de la Guermondière, la Laissanterie, la Maillardière ou la Villière. Cess Aubussonnais de la fin du XIIIème siècle devaient donc payer à leur seigneur des redevances en nature ou en argent, mais aussi effectuer des corvées sur la réserve du seigneur et, en cas de nécessité, réparer le moulin banal d'Aubusson. Le plus taxé d'entre eux, Jehan du Coudray, était astreint à faire les foins, couper les grains et les transporter à la grange seigneuriale, nettoyer les étables et épandre le fumier dans les champs du seigneur, fournir le bois de chauffe et d'outillage, voire le charroyer jusqu'à la résidence seigneuriale sise à La Chapelle-Biche, acheminer également la farine du moulin au four seigneurial....


L'expansion du peuplement aubussonnais constatée lors de ces beaux siècles (XIe-XIIIe) du Moyen Âge fut toutefois interrompue au XIVème siècle à la suite-alors que s'installait un climat froid et humide-d'une grave crise économique d'origine agricole, de la terrible et meurtrière peste noire qui atteignait la Normandie en juillet 1348, et des ravages liés à la guerre de Cent ans. Vers 1400, Aubusson ne comptait plus que de 16 feux (foyers); vers 1500, 18, soit moins d'une centaine d'habitants. De plus, durant ce siècle de léthargie démographique, la paroisse avait connu, comme la Normandie et plusieurs autres provinces du royaume, l'occupation anglaise. Celle-ci dura ainsi 3 décennies (années 1420, 1430 et 1440).La renaissance d'Aubusson se produisit au début du XVIème siècle où Guillaume de Grosparmy incorpora, en 1521, à la baronnie de Flers la Seigneurie de Gasprée et d'Aubusson. En un tiers de siècle, Aubusson gagna en effet une cinquantaine d'habitants, dépassant ainsi les 150 âmes. La grande majorité étaient des paysans mais il y avait parmi eux, outre le meunier du Moulin d'Aubusson, quelques artisans et notamment des charpentiers.Un destin lié, de la Renaissance à la Révolution, à la "terre de Flers"

Jusqu'à la Révolution, Aubusson fit donc partie de la baronnie de Flers qui comprenait également les paroisses de Flers, Saint-Georges-des-Groseillers, La Chapelle-Biche, La Chapelle-au-Moine, Saint-Clair-de-Halouze et l'importante forêt de Halouze où une grosse forge, mue par eau, produisait par jour plusieurs milliers de livres de fer- des Aubussonnais y travaillèrent-et procurait ainsi au seigneur de substantiels revenus. Aubusson eut donc pendant plus de 2 siècles et demi les mêmes barons-puis comtes à partir de 1598-que Flers: les Grosparmy, puis Pellevé et enfin La Motte-Ango. Ceux-ci avaient le droit de présentation au bénéfice-cure de Saint-Célerin (Céneri) d'Aubusson, la collation étant accordée au nouveau curé de la paroisse par l'évêque de Bayeux.
Sous l'Ancien Régime, la baronnie de Flers relevait en effet au religieux, du diocèse de Bayeux et du doyenné de Condé-sur-Noireau, et au civil, de la généralité de Caen et de l'élection de Vire. Proche de Sainte-Honorine-la-Chardonne et voisine d'Athis et Montilly-sur-Noireau, Aubusson compta cependant quelques protestants parmi ses habitants au XVIIème, mais ils furent contraints d'abjurer et renoncèrent à la "religion prétendue réformée".De quelque 150 habitants vers 1530, la vie était néanmoins rude et incertaine sous la monarchie absolue pour ces toiliers, laboureurs, journaliers et autres artisans d'Aubusson. Le 1er mars 1789, l'occasion leur fut donnée d'en faire état à travers la rédaction du cahier des plaintes et doléances des habitants d'Aubusson, paroisse, en vertu d'une très récente réforme, de l'arrondissement de Condé-sur-Noireau et du département de Vire. Sous la direction de leur première municipalité élue en septembre 1787 et installée en mai 1788, les chefs de famille d'Aubusson présentèrent 2 revendications majeures à l'attention du roi: la réduction des lourdes impositions royales et une voie Condé-sur-Noireau-Flers viabilisée mais passant en marge de leur territoire pour n'avoir qu'un pont à édifier sur la seule Vère.Pour justifier le premier point, les Aubussonnais évoquèrent la médiocrité de leur terroir-avec des espaces importants en bruyères, de longues jachères, le recours nécessaire aux engrais-la destruction des "mauvais bleds" (seigle, sarrasin) tant par les bêtes sauvages (sangliers, cervidés)-le bois de Flers est proche-que par les mans (vers blancs de hanneton), le chômage qui atteint souvent les nombreux tisserands et que le curé ne peut guère secourir en raison de la faiblesse du revenu de son bénéfice, et le fait que les meilleures parcelles soient possédées ou exploitées par des horsains qui n'acquittaient pas la taille dans la paroisse. Quant à l'axe Condé-sur-Noireau-Flers, vital pour la majeure partie du territoire d'Aubusson car il en constitue le seul débouché, ils réclamaient son aménagement avec un Pont de Vère praticable en hiver.Une commune modérée durant la décennie révolutionnaire.Ce 1er mars 1789, les Aubussonnais élirent aussi leurs 2 délégués chargés de se rendre, munis du cahier de doléances, à Vire le 5 mars suivant afin de participer à l'assemblée de l'élection de Vire devant réunir en un seul les cahiers de doléances et désigner les représentants de l'élection ayant mandat d'élire, à Caen, les 6 députés du Tiers Etat de la généralité. 2 des membres de la municipalité, Michel Cailly et Charles Callais, furent donc délégués. La Révolution était engagée et les premières mesures, notamment l'abolition des privilèges dans la nuit du 4 août, durent satisfaire les pauvres roturiers d'Aubusson.Les membres de l'Assemblée Constituante entreprirent bien vite une profonde réorganisation des structures administratives. La commune d'Aubusson se trouva ainsi intégrée au canton de Flers (sa première section comprenant, outre Aubusson et Flers, Saint-Georges-des-Groseillers, La Lande-Patry et La Selle-la-Forge), lui-même subdivision du district de Domfront, un des 6 districts du département de l'Orne. Pendant des siècles, la paroisse d'Aubusson avait été tournée vers Caen et Bayeux, désormais elle devait regarder vers Alençon et Séez.Au début de 1790, les citoyens "actifs" (électeurs) d'Aubusson procédèrent à l'élection de leur premier maire. Le laboureur Michel Cailly, de 1790 à 1792, le marchand Jean Blin, de 1792 à 1795, le laboureur Richard Gauquelin, en 1795, remplirent ainsi successivement cette fonction. Outre la mise en place de la nouvelle fiscalité et le maintien de la bonne police, le premier d'entre eux à gérer la délicate question religieuse. Curé d'Aubusson depuis 1782, maître Gilles Fouquet refusa en effet de prêter le serment pur et simple de fidélité à la Constitution civile du clergé. Privé de sa cure en 1791, il s'exila à Jersey où il mourut. Le deuxième, sous la République, eut à appliquer de difficiles mesures en raison du contexte de guerre: réquisitions de volontaires pour défendre la patrie en danger, de chevaux et d'équipements, perquisitions pour livrer les gains dissimulés...En raison de la déchristianisation qui obligea le curé constitutionnel Pierre Onfroy à cesser ses fonctions curiales en 1794, il dut aussi procéder à la fermeture du lieu de culte. Quant au troisième maire d'Aubusson, il dut poursuivre réquisitions et perquisitions et ce fut lui qui procéda à l'inventaire du mobilier et des ornements de la "ci-devant église" en 1795.

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